Rencontre avec Léo Publié le 16 septembre 2007 par Altaïr Dijon Julian I've got somethin' for you' mind you' body an' you' soul.... La foule se déploie dans l'air, animée par les vibrations telluriques. Car la musique est reine en ce lieu, elle enveloppe les corps et les reconfigure à sa guise. Je regarde les doigts de Daniel danser sur les platines noires, accélerer et ralentir le temps, contrôler l'espace et la gravité. Le Dj est un démiurge et j'ai envie, moi aussi, de me ployer comme un pantin, de sentir les fils s'enrouler autour de mes membres et me contrôler telle une simple marionnette. Lullaby descend et me tire par le bras, il y a du monde là-haut et elle a besoin de moi. Il paraît qu'un type est passé cette semaine pendant que je n'étais pas là, qu'il voulait me voir. Un grand type blond aux yeux très bleux, plutôt mignon ; je ne vois pas de qui il peut s'agir. Peut-être Jonathan, l'ex de Jed, mais qu'est-ce qu'il me voudrait ? Je l'ignore. Nous remontons à l'étage et passons derrière le comptoir. Je sers un jeune garçon en slim noir et tee-shirt à rayures rouges, qui commande douze bières pour lui et ses amis. Ils ont rapproché plusieurs tables dans un coin du bar et crient déjà très fort, je suppose qu'ils n'en sont pas à leur premier verre de la soirée. « Allez-y doucement, lui dis-je, et il me répond par un clin d'oeil en retournant s'asseoir. » Lullaby passe devant moi, l'air énervé, et se dirige vers le caveau. « Bon, moi je descends Julian, tu peux aller prendre la commande du petit couple là-bas ? Je leur ai dit que tu arrivais. » Furieux, je la regarde descendre les escaliers. Cette pétasse m'a fait remonter pour me prendre la place au caveau. Parfois il me semble que je déteste cette fille, et c'est tout tremblant de colère que je me présente à la table où deux jeunes gens viennent de s'installer. « Qu'est-ce que je vous sers ? je demande sans même les regarder, tirant de ma poche un petit carnet et un crayon. - Vous avez de l'Efta ? me demande la voix légèrement rauque du garçon, après un silence. » Je relève la tête et mes yeux plongent dans le gris de ses prunelles. Il est là, c'est lui, j'en suis certain, celui avec qui Nathan m'a mis en contact via MSN, le garçon mystérieux. Et il m'a reconnu, grâce à la photo de mon avatar... Je n'imaginais pas l'Efta si séduisant. D'emblée je reconnais en lui un véritable dieu, mon pressentiment ne m'avait pas trahi. Tout en lui respire l'harmonie de la perfection, l'intelligence accompagnée d'une beauté sans égale. Mais pas autant que nous, Julian. Je ne sais pas, je ne sais pas... Ne te laisse pas faire, montre lui qui nous sommes. Fais resplendir la clarté de notre lumière. Je ne sais pas... Je dois fuir les égaux de mon rang, car ils ont le pouvoir de me faire souffrir... Quel lâche tu fais Julian, tais-toi et laisse moi reprendre le contrôle. La glace, la glace sourde qui bouillonne et se répand dans mon sang, formant une coque d'acier impénétrable. Mes yeux se chargent de mépris et mes lèvres se teignent d'une moue de dédain. Je suis Julian Mahogany, le dieu resplendissant issue d'une lignée solaire. « Qu'est-ce que tu fais à Dijon ? je demande, aussi froid que possible. » C'est la fille qui me répond. Pauvre mortelle, ce n'est pas à toi que je m'adresse. Sa réponse parvient jusqu'à mes oreilles sans que je ne la regarde, car mes yeux détaillent depuis le début les quatre taches d'or qui, reliées, formeraient une petite courbe, comme un cil, un minuscule symbole dans l'iris de l'Efta. « Comment savez-vous que nous ne sommes pas d'ici ? Léo, tu le connais ? » Léo. Léo... La mortelle t'a trahi, beau dieu, désormais je sais ton prénom. Mon regard ne cesse de fixer tes prunelles, et cherche à pénetrer ton âme, à travers la glace, à travers le pétrole bouillonnant, pour sonder tes faiblesses et m'en servir contre toi. Cependant le combat se joue à armes égales. « Je t'expliquerai plus tard, reprend la voix du garçon, qui se tourne avec affection vers la jeune fille. » Eh bien quoi ? Tu n'es pas le bloc de pierre que tu laissais paraître ? Tu sembles épris d'elle, comme un simple mortel, si faible ! Je ne t'imaginais pas comme ça Léo, pas du tout comme ça. Je t'ai surestimé, sans doute. Alors, à quoi bon te prendre de haut ? « On est venu rendre visite à ma cousine, explique-t-il, elle est dans le coma à la clinique Saint-Lucas. » Je tombe sur la chaise vide, face à eux. Le sang quitte mon visage. « D-Déborah ? Tu es le cousin de Déborah ? » Il fallait s'y attendre. Le Destin nous a lié. Désormais, nous voilà pris dans sa toile.
