Des Feuilles mortes

Publié le par Shedar

Dijon
Dimitri 
 
Dimitri.jpgEncore un couloir, encore l’impression d’y être déjà passé... Autre couloir, même impression. Tout se ressemble trop ici. Un n-ième virage, une dernière porte, et nous voilà dehors, presque. Nous sommes toujours dans la clinique mais dehors un peu quand même. Il y a des bancs verts de plastique, des allées blanches de petits cailloux, et des vieux. Des visages sans couleur, une béquille d’un côté, un infirmier de l’autre. Quelques arbustes transparents de nudité, et des feuilles mortes, oranges de plus rien. Oranges comme attention il va faire froid cet hiver. Ou oranges comme attention s’il vous plaît ne m’écrasez pas j’ai déjà beaucoup souffert en tombant... Oranges ou jaunes, ça dépend. En novembre certaines feuilles ne sont pas encore mûres. Celles qui sont oranges croustillent un peu plus sous la semelle... C’est un petit parcounet semi-calme et faussement tranquille. Un de ces lieux qu’on emprunte avec le dégoût de ne pas s’en satisfaire et l’amère envie d’aller ailleurs. J’espère que Déborah n’y pense pas trop... Elle est encore fragile et je n’ai pas le droit de l’emmener plus loin. L’air médicamenteux de cette cour à promenade pour détenus est le seul échantillon gratuit d’automne que je puisse offrir à Déborah aujourd’hui. Il y a quelques couleurs, beaucoup plus que dans sa chambre, mais ce n’est pas cela l’automne...
Nous marchons aussi vite que les vieux, pour aller s’asseoir sur un banc. Comme les vieux. Peut-être que vieillir c’est parcourir l’automne de sa vie, c’est se préparer à traverser l’hiver. Accepter la fin. Laisser les feuilles mortes s’enterrer et rejoindre leurs semblables au vaste pays de l’humus. Un paradis dort juste sous nos pieds. C’est de là que les anciens nourrissent leurs suivants. De souvenirs, de fierté, d’honneur et de courage. Peut-être. Ce qui est sûr, c’est que Déborah est contente de me voir, et moi aussi. Elle me dit tout bas tous les potins de la clinique que lui racontent les jeunes infirmiers, me décrit le caractère de chacun et des autres malades qu’elle croise parfois. Ceux qu’elle aime bien, ceux qui l’énervent. Surtout ceux qui l’énervent... C’est tellement rassurant. De voir en vrai qu’elle redevient doucement elle-même, après tout ça. De voir qu’elle n’a pas abandonné, qu’elle continue d’abattre un par un les guerriers de l’épuisement... Ca devait être un puit, le coma.
 

Publié dans Dimitri

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
A
C'est beau, comme tout cela est décrit :) Les feuilles mortes, partout...
Répondre
A
Hehe, prenez garde à la Guerre de Bételgeuse ! Même Nova, elle vous poursuivra !
Répondre
S
Mince oups saperlipopette ça s'écrit puits....
Répondre
B
Un puits couvert de feuilles mortes......
Répondre
A
Bienvenue à vous, Elisa et Alpha :) Merci pour vos coms et n'hésitez pas à vous enregistrer sur le Forum !
Répondre