Empathie

Publié le 31 janvier 2007 par Altaïr

Dijon

Julian

Le loup-garou desserra son étreinte. La lune, au dehors, se mit à changer. Déjà la nuit ?… Comment était-ce possible ? Arthur regarda le garçon dans les yeux, il n’y perçut qu’un abîme de ténèbres embrasées. A travers la fenêtre paraissait le pâle éclat de la lune, ronde et pleine, comme un œil aveugle et laiteux dans l’immensité de la nuit. Le garçon s’approcha et La contempla de ses yeux abyssaux. A la surface de son épiderme se mit à éclore un pelage de bête qui le recouvrit de la tête aux pieds. Arthur, attaché à la chaise par de solides liens, comprit le sort que le garçon lui avait destiné. « Il va te dévorer encore chaud, comme tu l’as fait à cet homme l’autre soir, quand tu n’étais plus toi mais un peu lui, après l’avoir croisé dans cette boîte de nuit… Il va te bouffer comme une bête dévore sa proie… » Le loup avança jusqu’à la chaise et planta son regard dans celui d’Arthur. Ses croc luisaient d’un éclat de carnage. « Mais je peux le refaire, te prendre ce qui t’appartient, devenir toi. Tes souvenirs, tes pensées, tes émotions. Ce pouvoir de dieu qui palpite en toi. C’est cela, mon pouvoir. » Arthur se laissa caresser par la lumière de la lune. Son cœur se mit à pulser à l’unisson avec celui du loup, et il sentit affluer un flot de pensées et d’émotions qui n’étaient pas les siennes. Il y avait de la rage pure, comme une bulle de sang, une sphère rouge de colère battante, qui vibrait comme une bombe. Et derrière ce mur de colère, une douleur, une plaie béante et à vif ; le gouffre de la trahison. Lorsque le loup porta son premier coup, Arthur, d’une force surhumaine, avait déchiré ses liens, et rattrapa le poing de l’autre avant qu’il n’ait eu le temps de l’atteindre.
« Maintenant, c’est moi le loup. »

Jed demeure interdit devant le texte que j’achève de taper devant lui. Mon esprit revient s’ancrer dans mon corps. La boîte ne nous a rien appris de plus qu’auparavant. Elle ne comporte rien d’extraordinaire hormis cette petite fourche gravée dans le bois. Je commençais à me demander si… Non, il nous fallait quelque chose, quelque chose d’extraordinaire. Il fallait se raccrocher à un espoir, et j’ai décidé de lui présenter Arthur. Le temps que je reprenne mon souffle, c’est moi que Jed fixe sans comprendre. Il me demande si tout ça à un sens. Je lui réponds que je n’en sais rien, que ça me vient comme ça sans réfléchir. Il y a une histoire en moi, et elle a besoin de sortir.

« Un peu comme la colère que tu as en toi. »
Jed détourne les yeux. Comment croire que c’est ce garçon frêle et sombre qui a cogné sur moi avec toute la haine du monde, allant jusqu’à manquer de me tuer ? Qui es-tu Jed ? Un ami ? Un ennemi ? Ou tout simplement un pauvre type qui en pince pour moi ? Un type que j’ai trahi en lui dérobant l’amour de sa vie et qui n’arrive pas à recoller les deux bouts ?

Nathan, pourquoi fallait il que je rencontre Jed ?

Parce qu’il est ton gémeau.
C’est vrai, on se ressemble beaucoup lui et moi. Est-ce un signe ?

Tout est signe.
Le sens que je donne à la vie, le tribunal de l’âme… Est-ce cela ?

Oui, le pinceau qui applique des couleurs sur le monde.
Mais est-ce réel ? Ou bien n’est-ce que le fruit de mon imagination ?

Qu’est-ce que le réel ?

Nathan y croit. A moins qu’il ne soit fou…

En ce cas nous le sommes également.

Nous ?…

Jed me regarde étrangement.

« A qui tu parles, Julian ? »