Un zombie sur sa chaise
Lille
Damien
Quand on y pense bien, il ne doit pas y avoir pire souffrance que celle du réveil. S’extirper du monde des songes et de la chaleur de la couette. Ce matin, je voudrais bien assassiner mon réveil et étreindre un nombre incalculable de songes. Mais bon, il en est ainsi. Le réveil éteint et la couette rejetée, je pars à la recherche de mon pantalon. Celui-ci enfilé, je me plie à mon petit rituel matinal, en saluant Sofia. Le sourire qu’elle me renvoie me fait toujours autant plaisir. Elle est magnifique sur cette photo. Je l’embrasse et lui souhaite une bonne journée. J’ouvre la porte et traverse mon salon et atteint la salle de bain. L’eau chaude coule doucement ce matin. Problème de pression encore dans l’immeuble. Le contact de l’eau sur mon visage me permet de me réveiller et surtout de sortir mon esprit du brouillard de la nuit. Contrairement à beaucoup de monde, une fois levé et débarbouillé, je n’ai pas de mal à me lancer dans ma journée et ne suis pas du genre à être grincheux. Tout le contraire de Claire qui ressemble à un zombie avachi sur une chaise.« Salut soeurette ! La forme ?
- Oh ne commence pas s’il te plaît !
- Quoi ? Qu’est ce que j’ai dit ?
- J’ai mal dormi. Ne fais pas chier.
- Ok, ok. Un café ?
- J’en ai déjà un. Mais merci quand même. »
Elle lève la tasse au dessus de sa tête pour me la montrer et s’enfonce un peu plus dans la chaise. J’ouvre le frigo et prends la bouteille de jus de fruit dans la porte. Je bois directement à la bouteille, ce qui ferait rager ma mère si elle me voyait faire. Parfois, ça me manque…
« Papa et maman passent ce week-end, tu le sais ? Ils viennent voir si je m’occupe de toi. »
Elle ne relève même pas.
« Tu m’aideras à ranger un peu et on ira faire quelques courses avant qu’ils n’arrivent. Ok ? »
Pas de réponse.
« Hé ho ! Claire, je te parle. »
Je me rapproche d’elle. Elle est encore plus ramassée sur la chaise qu’au départ, mais en m’approchant d’elle, je remarque qu’elle est en train de dormir. Elle a l’air vraiment fatiguée. Je ne l’avais jamais vu comme ça. Je pose doucement ma main sur son épaule. Elle sursaute légèrement et penche sa tête sur ma main encore sur son épaule, sans ouvrir les yeux.
« Dis grand frère, tu l’oublieras jamais Sofia ? »
La question me glace le sang. Je ne peux empêcher une boule de se former instantanément dans ma gorge tant la question me touche et me surprend. Comme si je pouvais l’oublier. Pour rien au monde, je ne l’oublierai.
« Non. Bien sûr que non. Mais pourquoi tu me demandes ça maintenant ? »
Elle pose sa main sur la mienne. D’une voix endormie, mais douce, elle me répond.
« Moi, je sais qu’elle t’aimera toujours. »